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Parc éolien & protection des paysages : quand le juge s’inspire de Proust

La protection des paysages peut conduire à refuser une autorisation environnementale pour protéger un patrimoine culturel et immatériel, tel un lieu décrit par la littérature.

Pour rappel, l’article L511-1 du code de l’environnement applicable aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) dispose que :

« Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d’une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la protection de la nature, de l’environnement et des paysages, soit pour l’utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l’utilisation rationnelle de l’énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. »

Au visa de cet article, la Cour administrative d’appel de Versailles (CAA Versailles, 11 avril 2022, n° 20VE03265), a confirmé le refus de la Préfète de Loir-et-Cher de délivrer une autorisation environnementale. Celle-ci portait sur l’installation et d’exploitation d’un parc éolien près du village d’Illiers-Combray.

Cette décision de refus se fondait sur l’atteinte aux paysages et au patrimoine culturel protégé.

De façon assez surprenante et bienvenue, la Cour a pris en compte la dimension artistique et culturelle du paysage :

« il résulte de l’article L. 511-1 du code de l’environnement précité que l’exigence de protection des paysages induite par ces dispositions, qui est définie de façon très large peut conduire à refuser une autorisation d’implantation d’éoliennes afin de préserver un paysage présentant une composante immatérielle liée à son évocation au sein d’une œuvre littéraire reconnue. »

En l’espèce, la CAA a notamment relevé que le paysage impacté par le projet inscrivait matériellement les évocations littéraires de l’œuvre de Marcel Proust :

« Marcel Proust a décrit la plupart de ces lieux, où il passait des vacances lorsqu’il était enfant, dans la première partie de son roman « Du côté de chez Swann », intitulée « Combray », publié en 1913. »

En conséquence, au regard de l’atteinte ainsi portée au paysage et au patrimoine culturel par le projet éolien, la Préfète pouvait légalement refuser de délivrer l’autorisation environnementale sollicitée.

Dans son arrêt du 4 octobre 2023, le Conseil d’Etat a confirmé la position de la Cour dans un considérant historique :

« En prenant ainsi en considération des éléments qui ont trait aux dimensions historiques, mémorielles, culturelles et notamment littéraires du paysage, pour juger que le projet litigieux n’était pas compatible avec l’exigence de protection des paysages résultant des dispositions de l’article L. 511-1 du code de l’environnement, la cour n’a pas commis d’erreur de droit. »

Entérinant cette jurisprudence, la haute juridiction fait donc souffler un vent d’optimisme sur notre patrimoine.

Article écrit par Me Chloé Schmidt-Sarels

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